Le pouvoir des plantes

Le titre de cet ouvrage peut faire craindre d’emblée que l’on a affaire ici à un avatar de plus dans la longue liste de livres publiés depuis quelques années, prêtant au végétal des qualités exceptionnelles, souvent sur fond d’anthropomorphisme latent – tel le médiatique et navrant La Vie secrète des arbres, de P. Wohlleben ¹. Que l’on se rassure, il n’en est rien ici. L’auteur, ancien enseignant-chercheur postdoctoral reconverti dans le support de projets de sciences appliquées, s’appuie sur des connaissances, souvent récentes, en physique, chimie et biologie, qu’il partage dans un langage clair, accessible à un large lectorat.

Au fil du livre, l’auteur rend ainsi intelligible pour le non-spécialiste un ensemble de fonctions végétales telles que la photosynthèse, la respiration ou la transpiration, et aborde de nombreux phénomènes dont on n’a souvent qu’une connaissance superficielle, tels que l’ascension de la sève dans les troncs, les mouvements des plantes, leurs réponses adaptatives aux conditions environnementales, leurs mécanismes de défense contre divers types d’agressions, ou encore les associations symbiotiques dont elles sont le siège. Il s’attarde sur certains aspects qui étonneront le lecteur, tout en remettant à leur juste place des fausses idées hélas répandues, autour par exemple du « poumon vert ² » de la planète ou de la notion d’OGM. L’ouvrage se termine sur des éléments de prospective s’appuyant sur les capacités des plantes à piéger le carbone, dépolluer l’air et les sols, à produire médicaments, électricité ou bioplastiques.

La façon dont est explicitée la bibliographie utilisée pour ce livre est un gage de sérieux. Aucune référence n’est donnée dans le texte lui-même, allégeant d’autant ce dernier, mais une annexe détaillée fournit, chapitre par chapitre et pour chacun des items abordés, une sélection des sources utilisées, souvent des articles scientifiques publiés dans de bonnes revues, rarement des productions issues de la littérature dite « grise ³ ». Chaque présentation est assortie d’un court commentaire précisant l’intérêt de la source, et invitant le lecteur à s’y reporter.

Si l’auteur tombe rarement dans le piège de l’anthropomorphisme, on note parfois une certaine tendance au finalisme, dans des phrases prêtant une intention à la plante qui, par exemple, fermerait ses stomates pour minimiser sa transpiration, cesserait de croître pour économiser son énergie, ou encore enverrait des toxines à ses voisines pour les empoisonner. En outre, il sacrifie parfois à quelques thèmes rencontrant un large succès médiatique, sur des bases controversées ou qui se prêtent à de nombreuses interprétations pseudo-scientifiques, telles que la « neurobiologie végétale », la « communication » entre plantes, la « sensibilité » et la « mémoire » de ces dernières, les interactions entre arbres via un supposé « wood wide web ». Cependant, on reconnaîtra volontiers que chaque fois qu’il aborde un de ces sujets, l’auteur prend soin de préciser qu’il s’agit là de notions qui restent critiquées, et fournit systématiquement des références en ce sens.

L’ouvrage de V. Hammoudi est à recommander à qui souhaite s’informer, sur une base scientifique solide rendue compréhensible par un langage accessible, de l’état actuel des connaissances sur le fonctionnement des plantes et certaines de leurs étonnantes propriétés.