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La Science, une ambition pour la France

Publié en ligne le 3 novembre 2013
La Science, une ambition pour la France

André Brahic
Odile Jacob, 2012, 160 pages, 9,90 €

Dire non au pessimisme, c’est vital, c’est notre avenir qui est en jeu ! Le célèbre astrophysicien André Brahic, découvreur des anneaux de Neptune, acteur des missions Voyager et Cassini est notre meilleur ambassadeur pour écrire ce fervent manifeste, formidable plaidoyer pour la revalorisation de la recherche en France.

A. Brahic montre d’abord que la science est un des domaines de la culture au même titre que la peinture et la musique. Il est rare et vivifiant de voir un scientifique annoncer qu’il est absolument nécessaire de rêver, d’avoir de grandes ambitions et qui cite Valéry ou Hugo car « en face de la marée montante de la bêtise, il est nécessaire d’opposer quelques refus ».

Pour l’auteur, la science et la démarche scientifique sont aussi la réponse à des problèmes comme la violence, le chômage, la démagogie, ou même les fanatismes provoqués par la soumission et par l’exploitation de la crédulité. Porteuse des valeurs d’humanisme, car elle est universelle, la science libère de l’esclavage.

A. Brahic brosse un sévère état des lieux de la recherche actuelle, en n’épargnant aucun de ses défauts. On découvre une saga de politiques incohérentes, de comités d’incompétents, de structures inadaptées et l’omniprésence d’une bureaucratie étouffante. Constat inquiétant où l’on frémit d’apprendre que Galilée ou Einstein auraient peu de chances d’être retenus avec les critères actuels (domaines non prioritaires, publications insuffisantes…).

En clair, le système français serait frileux et inefficace. Des groupes corporatistes, un esprit clanique, une multiplicité de conseils, sous prétexte de démocratie, alourdissent ou découragent les initiatives. Des économies arbitraires et la course à la productivité conduisent paradoxalement au gâchis et de nombreux chercheurs préfèrent partir à l’étranger.

Et pourtant !... Pourtant, l’Europe est la patrie des sciences et sa vocation scientifique reste encore d’actualité. Les savants français sont souvent remarquables et nos universités sont encore des pôles d’excellence. Mais il faut un nouvel élan pour conserver cette richesse. Suivent alors une vingtaine de recommandations pratiques, des propositions concrètes ! En voici quelques-unes : nos meilleurs scientifiques dans les organisations décisionnaires, davantage de docteurs dans les ministères à la place de gestionnaires inadaptés, la création des conseils science-industrie et science-médecine, des réformes moins abruptes, des salaires décents, une retraite plus souple, la création d’une nouvelle revue comme Science ou Nature, mais en mieux !

L’auteur propose aussi un centre mondial de la recherche ET de lutte contre l’obscurantisme, une réelle place pour la culture scientifique au ministère de la culture, un service scientifique pour les journalistes à l’image de celui de la BBC, la création de véritables sites internet de qualité. Il s’agit d’aider et de donner un nouveau souffle à ce qui le mérite, mais en étant impitoyable avec les dérives, depuis les discours ésotériques de certains didacticiens jusqu’aux chercheurs farfelus envahissant les médias. André Brahic s’étonne de l’absence de sanctions aux universitaires ayant par exemple accordé une thèse promouvant l’astrologie (ou d’autres escroqueries) et propose des taxes pour les éditeurs qui exploitent la crédulité (astrologie, OVNI…).

Souhaitons que ce livre atteigne tous ceux qui peuvent faire évoluer la situation, hommes politiques, universitaires, journalistes, ainsi que le plus large public. A. Brahic est si convaincant et enthousiaste qu’il nous donne vraiment envie de le suivre. Le jeu en vaut la chandelle !