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Des virus remplaceront-ils les antibiotiques ?

Publié en ligne le 10 juin 2013 - Antibiotiques -

Actuellement, lorsque l’on évoque la lutte contre les maladies infectieuses causées par les bactéries, on se doit de tenir compte des restrictions apportées à l’usage des antibiotiques.

Affiche de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris

Depuis des années, l’accroissement des antibiorésistances a conduit à des mesures de limitation, tant dans les indications concernant l’homme (« les antibiotiques c’est pas automatique ») que dans les applications aux animaux (par exemple, suppression de leur usage comme facteurs de croissance). Mais ceci est loin d’avoir aboli la création de souches multirésistantes au point que, dans certains cas, aucun traitement n’est efficace.

Pour cette raison, les mesures de limitation d’usage iront en croissant et d’autres moyens devront être développés.

Parmi les solutions alternatives, une autre démarche antibactérienne, bien antérieure à la découverte des antibiotiques, mais pratiquement anéantie lorsque ceux-ci sont apparus, retrouve un réel intérêt : il s’agit de l’usage des virus bactériophages qui, comme leur nom l’indique, se développent aux dépens des bactéries qu’ils finissent par détruire [1]. Présents dans la nature, et constituant une population de très nombreuses espèces (au moins 5000), ils peuvent être apportés à des patients souffrant d’infections et éliminer les bactéries responsables de leur maladie, ce que les antibiotiques ne sont plus toujours capables de faire. Le terme de « phagothérapie » désigne cette démarche thérapeutique.

Si l’historique de cette discipline montre que cet usage remonte à la fin du 19e siècle, on ne peut être qu’étonné qu’il ait été autant négligé. En réalité, de nombreuses causes expliquent que les antibiotiques aient été préférés. La plus importante au plan pratique est que, si la phagothérapie nécessite l’identification précise de la bactérie afin d’appliquer un virus spécifique, les antibiotiques se sont massivement dispensés de cette obligation d’identification. Il faut noter que dans certains pays de l’Est, moins nantis que les pays occidentaux, la phagothérapie n’a jamais cessé, ce qui confirme son efficacité. Ceci justifie de relancer maintenant une recherche et une réglementation adaptée afin de développer l’usage de ces agents antibactériens et de communiquer activement sur leur biologie afin que les patients ne soient pas effrayés de se faire administrer des virus ! Une décision significative a été la création, en avril 2011, du CeFEP (Centre Français d’Étude sur la Phagothérapie) au centre hospitalier de Villeneuve-Saint-Georges.

[1] Dublanchet A. et Patey O. Histoire de la phagothérapie. Feuillets de biologie, 2012, vol.80, n° 304 : 1-7.

Publié dans le n° 303 de la revue


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L' auteur

Henri Brugère

Henri Brugère est vétérinaire, Professeur émérite à l’École Nationale Vétérinaire de Maisons-Alfort et président (...)

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