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Plantes d’Internet

Publié en ligne le 30 juin 2006 -
par Isabelle Burgun

On n’a plus les herbiers qu’on avait. Loin des herbiers gris et poussiéreux confectionnés dans certaines classes de biologie, ce sont des richesses patrimoniales... et de plus en plus électroniques !
Entretenus et conservés à l’abri, les herbiers possèdent même une grande valeur... financière ! Serge Payette parle des reçus d’impôts qu’il émet lors de dons effectués à l’herbier, soit 7,50$ par spécimen. « Si l’on devait le chiffrer, l’herbier Louis-Marie 1 s’évaluerait à des millions de dollars. Et sa valeur patrimoniale est sans prix », ajoute le conservateur.
Si tout va bien, l’équipe de l’herbier Louis-Marie, à l’Université Laval, soulignera dans deux ans le 400e anniversaire de la ville de Québec au moyen du projet Flore 2008, qui « proposera un parcours historique du travail des différents botanistes et collectionneurs de plantes de l’époque de Champlain à aujourd’hui », présente Serge Payette.

Dépoussiérer avec Internet

Ce dernier, en poste depuis seulement un an et demi, est professeur d’écologie, pas botaniste. C’est peut-être pour cela qu’il regarde l’herbier d’un œil neuf. « On attend d’un conservateur qu’il conserve. Mais notre travail est aussi de développer l’herbier, d’en faire un instrument pédagogique intéressant », insiste le conservateur, qui affirme d’ailleurs être en charge de deux herbiers, un réel et l’autre photographique.
C’est que de plus en plus, les spécimens se présentent sur cartons, munis de leur photographie numérique. Ce qui facile grandement les manipulations de ces collections fragiles.
Autre utilisation d’Internet : la publicité ! En fait, Serge Payette compte utiliser le site pour attiser l’intérêt des futurs lecteurs d’un ouvrage actuellement en préparation sur la flore Québec Labrador Nordique (publication prévue en 2008). « En mettant l’intégralité des deux premiers chapitres, celui sur les bétulacées (famille des bouleaux) et celui des pinacées (conifères), nous voulons que les lecteurs puissent juger sur pièce de la qualité ». Ce qui pour lui n’est qu’un juste retour aux contribuables et permettra de faire progresser la recherche. « Nous ne pouvons pas tout mettre dans un ouvrage et Internet permet une consultation différente grâce aux banques de données interactives ».
Car on s’en doute, les herbiers peuvent être d’excellents outils de recherche. De nombreux étudiants et professeurs consultent les collections dans le cadre de travaux en génétique ou sur les changements climatiques. Par exemple, la date de floraison de l’Érythrone d’Amérique, petite fleur sauvage typique des érablières, de plus en plus précoce, contribue à sa manière à alimenter le grand débat sur le réchauffement de notre planète.

Germination électronique

La tendance est là. Les herbiers se multiplient sur Internet. En commençant par celui du Pr Maurice Lalonde du Département de foresterie de l’Université Laval, baptisé Forestis - Herbariun eFloræ Quebecensis. Lancé pour prolonger un cours, il rassemble plus de 75 000 spécimens et fonctionne à l’aide de l’outil de recherche EctOsol
Il y a aussi l’Herbier virtuel initié en 2000 par Romain Néron, avec différentes collaborations au sein de la Direction des services technologiques du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ). C’est là qu’on découvre une partie des collections de spécimens de référence conservés à l’Herbier du Québec, notamment sa collection de... mauvaises herbes !
Du côté de l’incontournable Herbier Marie-Victorin, son équipe de conservation a débuté l’informatisation de sa collection en 1988 et créé une base de données (bdMT). Cet herbier recèle plus de 700 000 spécimens, dont une vaste collection de plantes vasculaires et de Bryophytes. Après une 3e édition de la Flore laurentienne (1995) et le lancement d’un CD Rom L’herbier Marie-Victorin (1992), il n’offre toutefois pas encore d’accès par internet à sa collection.
« C’est sûr, le nom du père Louis-Marie est moins connu que le frère Marie-Victorin et sa Flore laurentienne. Mais c’est un grand succès commercial qui ne rend plus justice à la science botanique », sanctionne Serge Payette. Les herbiers doivent dorénavant se moderniser et Internet est là pour ça.


À voir :

L’Herbier Louis-Marie
L’Herbier virtuel
Forestis - Herbariun eFloræ Quebecensis (disponible sur archive.org—5 mars 2020)
E.C. Smith Digital Herbarium (le plus grand herbier des provinces maritimes sur internet - disponible sur archive.org— 5 mars 2020)
Référence d’herbiers en ligne Tela-Botanica (disponible sur archive.org—5 mars 2020)

1 Cet herbier doit son nom au père Louis-Marie Lalonde, responsable du Laboratoire de botanique d’Oka entre 1923 et 1962. Il fusionne la collection de plantes de l’Université Laval (débutée en 1852) et celle de l’Institut agricole d’Oka, mais a pris récemment du poids : à la suite de récentes acquisitions, il comprend désormais les 10 700 spécimens de l’Herbier du Service canadien de la faune, les 3000 de l’Herbier du Centre de recherche d’Agriculture Canada de Sainte-Foy, les 120 000 de l’Herbier Rolland-Germain de l’Université de Sherbrooke et d’une partie de l’Herbier René-Pomerleau du Service canadien des forêts.
Particulièrement représentatif des espèces arctiques, alpines, sub-arctiques et boréales du Canada et de l’hémisphère nord, l’herbier Louis-Marie recèle 770 000 spécimens (14 123 spécimens d’algues, 13 712 spécimens de champignons, 36 712 spécimens de lichens, 2320 spécimens de graines, etc.) dont 12 % peuvent se consulter à partir de la banque de données HERCUL (Herbier catalogué de l’Université Laval).


Mots-clés : SVT


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