Accueil / Dans les médias / Le succès du Livre noir de la psychanalyse

Le succès du Livre noir de la psychanalyse

Publié en ligne le 27 septembre 2005 - Psychanalyse -

Début de l’article du Point, qui propose un entretien avec J.-A. Miller :
« Freud est un menteur et un mystificateur », clament les partisans des thérapies comportementales et cognitives. Ils le disent dans le Livre noir de la psychanalyse (éditions Les Arènes). Jacques-Alain Miller, l’un des chefs de file de la psychanalyse, répond à ces « braillards haïssant Freud ».

Voici la réaction d’une lectrice du Point, qui répond à Jacques-Alain Miller :

Des mères le poing levé

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’interview que vous avez accordée au journal le Point. Et vos propos fascinants ont fait immédiatement ressurgir de mon Conscient des souvenirs bien vivaces. Voyez-vous, j’ai le très désobligeant honneur d’appartenir à la horde sauvage de ces mères pathogènes, qui mirent au monde, dans l’horreur et la culpabilité que l’on sait, des bébés autistes. Que vous le vouliez ou non, le parcours du combattant qu’on impose à toute « mauvaise » génitrice, adjectif que je revendique la tête haute et le poing levé, reste encore et toujours tracé dans la droite ligne d’une pseudo théorie freudienne. Scandaleux ! En 2005, nous n’avons simplement toujours pas le choix, pour la simple et bonne raison que votre monopole « lobbyisant » ne permet pas, par définition, d’écart de pensée donc se garde bien d’informer qui que ce soit de tout autre mode de « prise en charge », terme que j’utilise avec des pincettes dans votre cas. Lorsque l’enfant autiste paraît, trouver un véritable psychiatre, qui pour une fois, soignerait un peu autre chose que les riches âmes errantes et somme toute pas si malades, relève de l’épreuve de force !

Des mères le fusil dans le dos

Quand on est en affaire (parlez-moi d’argent monsieur Miller...) avec des familles déjà décimées par l’annonce du handicap gravissime de leur enfant, il serait à présent bienséant que l’orientation thérapeutique change son fusil d’épaule, et je pèse mes mots : bien qu’on n’entre pas, selon vous, en analyse pour voir, c’est quand même le fusil dans le dos que nous sommes poussées, nous les infectes marâtres, dans ces petits salons où l’on cause bien, mais fort peu de nos canailles (quel poète ce Freud, qui trouva là une délicieuse pirouette pour désigner le débile mental). Hors de Freud et Bettelheim, point de salut ! C’est sous la menace du risque d’aggravation de l’état de nos enfants que nous sommes contraintes et forcées de participer à ces petites mises à mort que sont en général les séances sirupeuses de vos partisans. Le fusil dans le dos et pour voir, nous assistons ainsi à la réhabilitation ( !) miraculeuse de nos petits Tordus, grâce à vos pansements appliqués aux blessures de leurs psychés. Extraordinaire à voir, si ce n’était aussi sinistre, d’entendre vos pairs s’adresser à des enfants muets, parfois sourds, parce que biologiquement incapables de parler donc de restituer et n’ayant aucun accès cognitif à la symbolisation ! Qu’en aurait dit votre Père à tous qui ne s’adressait qu’à des êtres doués (même les canailles) de parole ? Apprenez à aboyer JAM, et tentez l’école vétérinaire, vous pourrez enfin rejoindre la troupe des beuglants que nous sommes !

Le Livre noir, en écho aux voix jamais entendues

Pour toutes ces raisons, voyez-vous, ce Livre noir est sain, salutaire et nécessaire parce qu’il fait écho, je n’en doute pas une seconde, à une multitude de voix jamais entendues, parce que la parole de gens qui souffrent véritablement est sûrement bien trop douloureuse pour que vous puissiez vous autoriser à l’entendre publiquement. Parlez-nous de choix, monsieur Miller ! À n’en pas douter, vous êtes un grand démocrate doublé d’un fin pédagogue. Si tant est que vous vous reconnaissiez dans ces termes, pourquoi, puisque vous avez l’espace médiatique pour le faire et les chaires de France et de Navarre à votre portée, pourquoi, disais-je, ne tenez-vous pas votre rôle d’homme public (bien plus avantageux que les femmes du même nom...), conscient de la parole qu’il transmet et du travail citoyen qu’il ne manque pas d’assurer ?

Un devoir éducatif que la France n’assure pas

Pourquoi ne dites-vous pas que la France a perdu l’année dernière, face au Conseil de l’Europe, parce qu’elle n’assure pas son devoir éducatif auprès des enfants autistes ? Pourquoi ne dites-vous pas que la souffrance a le choix de son soulagement ? Pourquoi vous enfermez-vous dans votre gotha mondain et élitiste dont le Livre noir vient de faire trembler l’omnipotence absolue ? Est-il si difficile de faire amende honorable ? Est-il si difficile d’être humble, intelligent, honnête et tout à la fois bien portant ? Faites une TCC, vous y arriverez !

Verbiage et pauvreté scientifique

Je pense qu’il est temps, cher monsieur Miller, que vous et vos camarades de classe fassiez votre deuil de l’autisme et des pathologies extrêmement lourdes avec lesquelles vous dealez encore parce qu’elles n’appartiennent pas à votre champ de compétences et que vous n’y pourrez jamais rien. Elles sont bien trop graves pour qu’on les laisse fricoter avec la légèreté vertigineuse du verbiage lacanien et la pauvreté scientifique de Sigismond. J’ai découvert les stratégies behavioristes, après avoir perdu deux ans de nos vies, celle de mon fils et la mienne, dans vos ghettos sectaires. Pour tout l’or du monde je n’y reviendrai jamais !

Mon fils est à présent bien dressé, élevé (vers le haut) et presque propre sur lui. Je ne le brûle pas à la cigarette ni ne lui envoie des décharges électriques (avec son gros déficit de l’intégration neurosensorielle il adorerait sûrement ça !) et je suis absolument ravie d’avoir rejoint cette bande de braillards, hystériques et malpolis. Fasse que leurs hurlements court-circuitent les soupirs élégants, velléitaires et prétentieux des pantouflards guindés de votre caste.

Agnès Fonbonne
Le 23 septembre 2005