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Faucheurs de science

Publié en ligne le 13 janvier 2013
Faucheurs de science
Les fanatiques sont dans nos campagnes

Gil Rivière-Wekstein
Édition Le Publieur, 2012, 123 pages, 12 €

L’auteur du livre est fondateur de la revue Agriculture Environnement dans laquelle il publie des articles bien documentés et sans concession sur les biotechnologies agricoles. Il est membre de l’AJA (Association Française des Journalistes Agricoles). Il a, dans la même collection, publié deux livres, l’un sur les abeilles et l’autre sur l’agriculture bio. Il entretient des liens étroits avec des représentants des agriculteurs.

Le texte de cent pages est divisé en huit chapitres suivis de la biographie succincte de vingt-sept personnes que l’auteur considère comme jouant un rôle clef dans l’opposition française aux OGM. Une constatation surprenante est que la plupart des faucheurs volontaires ne sont pas des agriculteurs et n’ont souvent pas une grande culture dans le domaine, ni un respect particulier pour cette profession. Viennent pour finir quatorze pages résumant année par année, de 1997 à 2012, les principaux faits se rapportant à la culture des OGM en France. Au début de chaque chapitre se trouve un dessin humoristique en rapport avec le texte.

Fidèle à son habitude, l’auteur a eu le souci d’apporter des informations nombreuses et nouvelles dans la mesure où elles ne sont pas connues du plus grand nombre. L’auteur a dû se livrer à des investigations inusuelles pour obtenir certaines d’entre-elles tenues confidentielles par les intéressés. Les faucheurs sont montrés comme ayant des stratégies très élaborées tant pour ce qui concerne leur utilisation des média que pour les actes de destruction d’OGM proprement dits. Leurs méthodes, en particulier la gestion de l’argent dont ils disposent et des opérations de commandos, apparaissent violentes, plus proches de pratiques mafieuses que des démonstrations pacifiques dont ils se réclament. En d’autres termes, ils sont présentés comme des ennemis de la démocratie qu’ils prétendent sauver. Ils sont comparés à des adeptes de Lyssenko qui s’attaquent à la science en tant que telle. Selon l’auteur, les références des faucheurs volontaires à divers personnages historiques (H.D. Thoreau, Gandhi, Martin Luther King) ne sont pas crédibles car ces derniers n’ont jamais rien détruit.

Certains épisodes, comme la grève de la faim de José Bové, sont décrits en détail et font apparaitre au grand jour les manipulations des pouvoirs politiques comme de l’opinion publique. Les reculades des pouvoirs publics et des décideurs du domaine sont rapportées avec suffisamment de détail pour qu’on en comprenne les mécanismes. La destruction de la vigne génétiquement modifiée de Colmar est décrite pour ce qu’elle est : un pur et simple gâchis qui a ébranlé la confiance et la bonne volonté de ceux qui, on ne peut plus honnêtement, cherchent des compromis constructifs.

L’impact européen des actions des faucheurs volontaires est considéré par l’auteur comme relativement mineur. La contestation anti-OGM se développe en effet de manière parallèle mais à des degrés divers dans différents pays de l’UE.

S’il est difficile de vérifier le bien-fondé des interprétations que l’auteur fait des événements qu’il décrit, force est de constater qu’elles sont plutôt compatibles avec les observations que toute personne intéressée par le sujet peut faire. Quoiqu’on pense de ce livre, c’est un ouvrage de référence résumant l’histoire de la controverse sur les OGM en France pendant les quinze années qui viennent de s’écouler.