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Un monde fou, fou, fou : juillet-août 2003

Publié en ligne le 19 août 2008 - Rationalisme -
SPS n° 258

Le salon de la parapsychologie

Du 12 au 23 février 2003 a eu lieu le salon de la parapsychologie à Paris.

Le charlatanisme affiche son coût

Parrainé par « Diet infos », revue de « l’alimentation saine et des médecines naturelles », ce salon vise d’abord un public aisé.

Droit d’entrée : 8 euros. Mais ce n’est qu’un début. 8 euros, c’est juste pour vous promener. Chaque exposant propose des consultations qui varient entre 20 euros (pour une consultation de voyance de 15 mn) et 50 euros lorsque sont associées astrologie, numérologie, tarologie et graphologie. Et surtout on vous fera des propositions très onéreuses de stages d’initiation à la bio-nature, à la réflexologie, à l’hypnose, ainsi qu’aux méthodes des guérisseurs, des magnétiseurs et des radiesthésistes.

Qui sont-ils, ces escrocs nébuleux ?

En matière de voyance, les voyantes sont en majorité. Elles préfèrent se faire appeler astrologues-numérologues-graphologues, alors que les hommes affectionnent les titres de médiums, mages, avec don de tarologie, mais peu de référence à l’astrologie.

Curieusement il n’y avait ni boule de cristal ni chiromancie. Faut-il supposer que ces « pratiques de fête foraine » n’ont pas leur place dans un salon qui se veut « sérieux » ?

Le clou du salon… et de la mystification : l’aura

Pour 30 euros, le visiteur a l’incroyable occasion de faire photographier son aura.

L’aura est le prétendu champ magnétique qui entoure chaque être vivant et dont on peut analyser les couleurs pour décrypter les vibrations. Ce sont ces vibrations qui reflètent les émotions.

Après vous avoir pris en photo avec un polaroïd mal réglé et une lampe à infrarouge, le gourou va interpréter les couleurs générées en termes de vitalité, guérison, créativité, pouvoir personnel etc. Et si jamais vous avez la couleur noire dans votre aura, c’est que vous avez la malchance de ne pas avoir d’énergie. Alors vous repartirez le moral en berne…

L’ésotérisme a ceci d’extrêmement choquant qu’il ne vous laisse plus une parcelle de libre arbitre. Votre vie est cadrée, vos émotions ne sont même plus les vôtres. Elles seront celles que l’aura montrera. C’est une mainmise totale sur la liberté de l’individu.

Un soucoupiste entre à l’école

Jean-Jacques Vélasco, directeur du SEPRA 1, s’est prêté, en décembre 2002, à un entretien avec un journaliste de Clés de l’actualité junior, revue hebdomadaire très connue dans les écoles élémentaires, sur le thème des soucoupes volantes. Il s’y plaint du désintérêt, voire du mépris des scientifiques pour l’ufologie et y affirme que pourtant des « phénomènes paranormaux se déroulent dans le monde entier ».

La conclusion balance, afin que chacun puisse y puiser tout et son contraire : « Et surtout, je ne pars jamais de mes croyances personnelles, même si après 30 ans d’étude, j’ai ma petite idée personnelle sur les extraterrestres ! »

On reconnaît bien là l’homme qui navigue à vue entre sa vitrine « scientifique » et sa passion soucoupiste.

Ce magazine a fait fi de la rigueur et de l’esprit critique qui lui incombent en interrogeant un pseudoscientifique. Combien d’enseignants pourront prendre le temps, en classe, d’une analyse démystifiante de ce texte ?

Pandémie… astrologique

Si le public n’était pas un tant soit peu raisonnable, il aurait cédé à la panique en lisant le dossier du mois de mai 2003 d’Élisabeth Teissier sur son site internet. Elle nous y affirme en effet que la pandémie de pneumonie atypique nous est tombée du ciel, et qu’elle l’avait annoncée pour la Nouvelle Lune du 3 mars : « Une épidémie pourrait faire la une » Une fatalité sidérale, en somme. Lisez plutôt : « Le grand cycle Jupiter-Neptune est toujours actif de par l’opposition de ces deux planètes, miroir d’un climat favorisant les débordements religieux, les sectes et autres faux gourous, les épidémies… »

Puis elle présente comme une « preuve irréfutable et décisive » le fait que le même cycle planétaire accompagna la peste noire au XIVe. Et notre astrologue de conclure : « Hasard exclu, donc… » C’est d’ailleurs avec ce genre de « preuve irréfutable » que l’astrologie voudrait asseoir son statut de science.

D’autre part, pour le cas où vous seriez encore trop optimistes, Teissier s’occupe de vous affoler un peu plus. La planète Mars, entrée dans cette danse macabre on ne sait quand, devait aggraver l’épidémie vers la mi-mai. Mais Teissier assure ses arrières. Ce n’est pas obligatoirement la pneumonie qui va se renforcer mais peut-être d’autres maladies qui vont surgir à cette occasion.

Pour conjurer ces malédictions d’un autre temps, je vous propose une petite provocation, celle d’exercer une liberté qu’aucun astrologue ne se permet : l’observation du ciel. Chaque début de soirée de votre été 2003, la flamboyante Mars attirera tous les regards vers l’est-sud-est. Vous ne pourrez pas la rater. De temps en temps, pensez à vous tourner vers elle. Vous aurez alors, dans votre dos, derrière l’horizon, le Soleil, et vous imaginerez l’alignement Mars-Terre-Soleil qui permet à Mars de recevoir la lumière solaire en pleine face et d’être si belle.

Mars n’aura donc pas d’autre pouvoir que celui de susciter l’admiration, et c’est bien le plus important.

Ont contribué à cette rubrique : Elie Volf et Agnès Lenoire.

1 Service d’Expertises des Phénomènes Rares Aérospatiaux. Lire l’article « Un cheval de Troie au CNES » dans SPS n° 257.