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Vous reprendrez bien un peu de vérité ?

Publié en ligne le 25 mars 2008
Vous reprendrez bien un peu de vérité ?

Didier Nordon
Éditions Belin, Pour la science, 2007, 175 pages, 17 €

Didier Nordon est mathématicien et tient une chronique dans le mensuel Pour la science, où il porte un regard critique sur les rapports de la science et de la philosophie avec la société. Une partie de ces chroniques sont ici réunies, accompagnées de leur fidèle illustrateur Matyo. Le lecteur aura plaisir à y retrouver le ton piquant de ses analyses, quelques absurdités pointées dans nos raisonnements, et quelques vérités énoncées – bien qu’il s’en défende dès le titre. Parmi ces vérités, à noter celle-ci, qui revêt un caractère d’actualité, en cette période de refonte de l’école : « À qui la faute si, aujourd’hui comme jadis, l’élève ne comprend une théorie difficile qu’après l’avoir dix fois, vingt fois, appliquée à contresens ? […] Dans un monde de supersoniques et de TGV, l’enseignement progresse au même pas que dans le monde de bateaux à voile et de char à bœuf. Dans un monde où tout va plus vite, rien ne lui permet d’aller plus vite. Voilà ce dont nous devons tenir compte avant de porter un "regard critique sur les performances de notre système éducatif”. »

Mais Didier Nordon dégage aussi pléthore de questions, qui n’appellent souvent aucune réponse, aucune vérité, comme celle-ci, née de l’adage ironique : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? », qui devient, énoncée par l’auteur : « Pourquoi faire simple est-il si souvent plus difficile, moins spontané, que faire compliqué ? » Mais la réflexion de notre mathématicien porte aussi beaucoup sur sa discipline, où il excelle en autodérision. Il fustige par exemple notre propension à nous moquer des scientistes du XIXe siècle qui prétendaient que la science connaîtrait bientôt tout. Pour lui, ces scientifiques ne sont pas plus à blâmer que ceux d’aujourd’hui, qui, par excès de modestie (ou effet post-moderne ?), n’apprécient que les découvertes qui laissent des questions en suspens, du grain à moudre aux suivants, réduisant ainsi la recherche scientifique à un statut « de divertissement pour chercheurs ».

On peut ne pas être toujours d’accord avec Didier Nordon, mais ses arguments sont toujours pertinents et riches, sources de débats. Son regard extérieur sur notre société, particulièrement scrutateur et critique, souvent amusant, nous est indispensable.

Publié dans le n° 279 de la revue


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Auteur de la note

Agnès Lenoire

Agnès Lenoire est enseignante. Elle a été membre du (...)

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